Maus - Art Spiegelman (1978 - 1991)

Maus - Art Spiegelman (1978 - 1991), Prix Pullitzer 1992. Je n'avais jamais lu Maus - malgré la pluie de récompenses, (prix pullitzer !), les éloges unanimes - sans doute par lâcheté d'affronter un sujet aussi complexe et terrible que l'Holocauste, ou Shoah, ou Extermination. Ou la volonté d'échapper un spectre que l'on ne cesse de nous agiter durant les études, qui plane lentement sur toute la civilisation occidentale depuis 60 ans. Bon ben la lecture de Maus m'a remis tout ces cauchemars bien en place ! 5 à 6 millions de morts (!!) (8% de survivants en pologne) - 800 000 dans les ghettos, 1 400 000 tués par balles, 2 900 000 dans les camps (dont 2 700 000 gazés) ; éradication de la culture juive d'europe de l'est (80 à 90% des juifs de l'Est) ; la "participation" directe ou indirecte de quasiment toute l'Europe, la "passivité" "non réaction" des Alliés, du Vatican, des résistants. Sans parler des échos que cela a suscité : troubles psychiques des survivants (culpabilité du "rescapé"), sujet "tabou" jusqu'aux années 70, littérature / production artistique autour de la Shoah (jusqu'au récent Tarantino), négationismes divers et variés.
Comment Maus s'inscrit-il dans ce sujet si brûlant ? Spiegelman superpose deux trames : l'histoire de son père, allégorie du destin commun des juifs est-européens et une histoire plus personnelle, transposée dans le présent : les relations entre lui et son père, via le fantôme de sa mère qui s'est suicidée. Ou comment son père est resté marqué par l'évènement, et par boule de neige, comme son fils est aussi indirectement accablé par l'histoire. Sur le plan graphique, il a recours aux "masques" ou allégorie animale : les juifs sont représentés par des souris (l'allemagne hitlérienne les montrait sous des formes de rats), les polonais par des cochons, les français par des grenouilles, les allemands par des chats. Cette transposition est fondatrice de la narration et permet de nous projeter imméditament dans une sorte de "monde parallèle" qui évoque la réalité historique sans l'affronter directement : à la différence d'un film, qui présente une réalité, qui aussi réaliste soit-elle, n'est toujours qu'un décor à mille lieux de la vérité ; l'usage de symboles et de métaphores permet au contraire, à mon avis, de nous approcher par une voie détournée de cette sorte de "soleil noir brûlant" qu'est la Shoah. La métaphore des animaux est aussi proche des théories "nationalistes - racistes" des années 1900 - 1930 : chacun est rangé dans une petite case en fonction de son appartenance : l'Allemand, le Français, l'Anglais, le Noir (sans nationnalité précisée...), le Jaune, le Juif etc. Dans le monde de Maus, difficile d'échapper à comment l'on a été défini comme animal... même si les souris portent des masquent de cochons, elles sont rapidement découvertes. Tout ce jeu de masques est particulièrement intéressant et mériterait une analyse plus approfondie (pas le courage!).
Structurellement, la narration scinde la vie de Vladeck Spiegelman en deux parties : avant Auschwitz (jusque 1944 si je ne me trompe pas) : le piège qui se referme inexorablement, mais doucement, quoi que l'on fasse : les connaissances qui disparaissent les unes après les autres, dans un véritable jeu de chat - souris absolument cauchermardesques, où l'on ne doit la vie qu'à un jeu de hasard extraordinaire. Historiquement, le témoignage est très important : rôle des "conseils juifs", ghettos, rafles, cachettes (sous des tas de charbons, dans des greniers), protection chez l'habitant polonais (moyennement finances), marché noir. Puis vient le camp d'Auschwitz et la description d'un univers évidemment très similaire à "si c'est un homme" de Primo Levi (que j'ai déjà lu) : les tris, privations, de nouveau le marché noir, "chacun pour soi", les baraquements, les travaux absurdes, les "marches de la mort" lors de l'évacuation, la libération, les nouveaux dangers (de très nombreux juifs de l'est furent tués par les polonais à leur retour dans leur pays natal, quand ils ont réclamé la restitution de leurs biens volés).
Le chef d'oeuvre naît de la superposition de l'épaisseur du témoignage historique, de l'usage des symboles et de la description humaine des relations entre le père et le fils ; de cet ensemble dense et cohérent qui restitue ce passage historique si dur.
Comment Maus s'inscrit-il dans ce sujet si brûlant ? Spiegelman superpose deux trames : l'histoire de son père, allégorie du destin commun des juifs est-européens et une histoire plus personnelle, transposée dans le présent : les relations entre lui et son père, via le fantôme de sa mère qui s'est suicidée. Ou comment son père est resté marqué par l'évènement, et par boule de neige, comme son fils est aussi indirectement accablé par l'histoire. Sur le plan graphique, il a recours aux "masques" ou allégorie animale : les juifs sont représentés par des souris (l'allemagne hitlérienne les montrait sous des formes de rats), les polonais par des cochons, les français par des grenouilles, les allemands par des chats. Cette transposition est fondatrice de la narration et permet de nous projeter imméditament dans une sorte de "monde parallèle" qui évoque la réalité historique sans l'affronter directement : à la différence d'un film, qui présente une réalité, qui aussi réaliste soit-elle, n'est toujours qu'un décor à mille lieux de la vérité ; l'usage de symboles et de métaphores permet au contraire, à mon avis, de nous approcher par une voie détournée de cette sorte de "soleil noir brûlant" qu'est la Shoah. La métaphore des animaux est aussi proche des théories "nationalistes - racistes" des années 1900 - 1930 : chacun est rangé dans une petite case en fonction de son appartenance : l'Allemand, le Français, l'Anglais, le Noir (sans nationnalité précisée...), le Jaune, le Juif etc. Dans le monde de Maus, difficile d'échapper à comment l'on a été défini comme animal... même si les souris portent des masquent de cochons, elles sont rapidement découvertes. Tout ce jeu de masques est particulièrement intéressant et mériterait une analyse plus approfondie (pas le courage!).
Structurellement, la narration scinde la vie de Vladeck Spiegelman en deux parties : avant Auschwitz (jusque 1944 si je ne me trompe pas) : le piège qui se referme inexorablement, mais doucement, quoi que l'on fasse : les connaissances qui disparaissent les unes après les autres, dans un véritable jeu de chat - souris absolument cauchermardesques, où l'on ne doit la vie qu'à un jeu de hasard extraordinaire. Historiquement, le témoignage est très important : rôle des "conseils juifs", ghettos, rafles, cachettes (sous des tas de charbons, dans des greniers), protection chez l'habitant polonais (moyennement finances), marché noir. Puis vient le camp d'Auschwitz et la description d'un univers évidemment très similaire à "si c'est un homme" de Primo Levi (que j'ai déjà lu) : les tris, privations, de nouveau le marché noir, "chacun pour soi", les baraquements, les travaux absurdes, les "marches de la mort" lors de l'évacuation, la libération, les nouveaux dangers (de très nombreux juifs de l'est furent tués par les polonais à leur retour dans leur pays natal, quand ils ont réclamé la restitution de leurs biens volés).
Le chef d'oeuvre naît de la superposition de l'épaisseur du témoignage historique, de l'usage des symboles et de la description humaine des relations entre le père et le fils ; de cet ensemble dense et cohérent qui restitue ce passage historique si dur.






